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Je ne t'en veux pas - Nina

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Laurie Petersen
Laurie Petersen

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Je ne t'en veux pas - Nina Vide
MessageSujet: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptySam 23 Jan - 0:24

« C’est ridicule, on ne peut pas la prendre, Laurence, personne ne la connaît ».

Pour une fois que Laurie se donnait la peine de téléphoner à son agent, il se faisait recaler. Cette femme était tout bonnement à jeter aux ordures. Allumant une cigarette, le combiné calé derrière son oreille, il aspira une bouffée avant de reprendre ses arguments :

« Bon. Écoutes. Je ne te demandes pas ton avis. Tu la bookes et tu m’appelles quand c’est fait. »

Sa correspondante raccrocha sans répondre, laissant le jeune homme dans un sourire méditatif. Balançant le téléphone quelque part sur la moquette, il acheva sa cigarette, le regard perdu dans le vide.

Une voix se fit entendre, à coté de lui : « Tu m’as oubliée? »


Deux semaines plus tard on lui annonçait que le numéro de mars de Velvet, aurait dans son édito une certaine Nina Morineau, shootée par le fameux Laurie Petersen. Nous étions encore en janvier, le shooting était encore à faire. Pour avoir déjà rencontré la jeune femme, notre photographe savait que ça n’était pas donné. Pourtant, il avait de l’espoir. Pourtant, il était de bonne humeur. Peut-être parce qu’il s’agissait d’un moment idéal : il était 20 heures, Paris s’activait.
La séance photo avait lieu sur les toits, au dessus d’un immeuble qui n’aurait sans doute jamais espéré avoir le prestige d’être encore immortalisé, tant son état de décrépitude était avancé. On l’avait habillé, ce toit. Le sol avait été nettoyé, retrouvant une couleur grise qu’il n’avait pas dû avoir depuis bien longtemps. Des spots installés tout autour lui donnait un air de fête. Tout paraissait propice à un shooting parfait. A l’exception, peut-être, du fait qu’il commençait à pleuvoir. Les assistants, avaient commencés à s’affoler, déployant des espèces de bâches, de manières à ruiner parfaitement les effets de lumière que la pluie pouvait provoquer. Certes, cela sabotait du matériel… Mais sérieusement, Laurie s’en tapait.

Assis dans un coin, il observait la scène, une cigarette entre les lèvres. Ce qu’il attendait, c’était son modèle, que la séance photo commence.
Ces crétins ne voyaient pas que la pluie était l’idéal, pour le contexte, que cela se mêlerait parfaitement au contexte du shooting, à l’histoire qu’il voulait apporter?

Il ne pleuvait pas bien fort et il craignait que cela cesse avant l’arrivée de Nina.

« Where is my model? » demanda-t-il à son assistant au bout de dix longues minutes. Il poursuivit, toujours en anglais : « On doit commencer, allez me la chercher ».

Il ne regrettait pas de l’avoir choisie : il ne regrettait jamais ses choix, c’était une preuve de faiblesse. Mais bon sang, il se demandait pourquoi cette fille avait choisi d’être mannequin. Parce qu’elle pensait que sa garde robe se porterait mieux? Exaspérant.

Le sol était légèrement humide. Le ciel était bas, Paris illuminée. Il faisait plutôt froid, assez pour que la plupart des assistants soient sur couverts. Lui ne portait qu’un pull-over noir, un jean de la même couleur et des mitaines usées, histoire de préserver ses mains du froid. Venant du Danemark, il n’était pas frileux.
En revanche, une qui risquait de l’être, était sa cible du moment. Le mot clé du shooting? Vestale. Elle allait sans doute lui en vouloir : lui imposer une séance en extérieur durant laquelle elle ne serait que légèrement vêtue ET pieds nus?
En même temps, rien ne l’avait obligée à accepter.
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Nina Morineau
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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyDim 24 Jan - 23:00

- … et les castings pour Milan, on sait jamais, regarde sur Youtube y’a toujours des débutantes qui ne savent pas marcher et qui sont quand même prises pour l’ouverture – Vera Wang 06, c’était un désastre. Je ne dis pas que tu n’as pas la démarche hein, mais si tu leur tapes dans l’œil ET que t’es habituée aux échasses, tu as ta chance. Bref, la bonne nouvelle pour la fin ?
- Un catalogue la semaine prochaine ?
- Efface-moi cet air blasé, j’ai beaucoup mieux que ça : un éditorial, rien que pour toi !
- … si je passe le casting.
- Non, justement, pas de casting ! Le photographe t’a déjà choisie, c’est une opportunité en or et je t’interdis d’hésiter.
Quelques secondes d’hésitations, pourtant. Edito = €€€ ?
- C’est bien, un édito, n’est-ce pas ?
- Très bien. Surtout avec Petersen. Je veux dire, un photographe en vogue qui choisit une fille avec 3 shootings à son actif, ça n’arrive pas tous les jours. D’habitude, c’est plutôt lui qui se fait harceler par les magazines – et les bookeuses. (Grand sourire)
- Eh… Petersen ? Le même Petersen que la dernière fois ?
- Tu l’as déjà rencontré ? Ah ouiii, j’oubliais, c’est vrai. Voilà, le même. Chanceuse.
- Mais…
- Je peux trouver quinze filles en trois secondes qui seront ravies de le faire à ta place Nina, et elles ne resteront pas là avec une tête d’enterrement, crois-moi. C’est oui ou non, et c’est maintenant.
- OK. D’accord.
- Super. Je t’appelle pour la date, l’heure, tout ça, quand on aura fixé les détails. Maintenant dégage, j’ai du boulot !

Elle sortit de l’agence en pilotage automatique. « Chanceuse ». Bien sûr. C’était quoi ce bordel ? Un gigantesque complot destiné à la ridiculiser et la rayer définitivement des bancs de la CMA ? Ça ne lui avait pas suffit, la dernière fois, il voulait en remettre une couche ? Elle resta perplexe, plantée devant la porte, indifférente aux bousculades des mannequins qui entraient, sortaient, faisaient demi-tour et attrapaient un taxi. Prenant conscience du merdier dans lequel elle s’était foutue en ayant cru pouvoir se remplir les poches facilement. On ne lui avait pas dit que c’était un métier à plein temps. Qu’il fallait courir dans tout Paris pour espérer décrocher une pub qui ne rapporterait finalement pas plus de cinquante euros. Ses illusions se cassaient déjà la gueule. Et son compte en banque aussi, puisqu’elle passait de moins en moins de temps en coulisses à maquiller. Autant faire caissière à mi-temps, finalement, et reprendre son ancienne routine… Oui mais non. Il ne fallait pas sous-estimer son amour-propre, que l’on flattait tous les jours et qui avait finit par y croire, à ces belles paroles. On lui disait qu’il fallait du temps, de la patience. Elle n’en avait pas. À ce rythme-là, il ne resterait plus que trois solutions : soit elle abandonnait, soit elle s’endettait encore plus, soit elle finissait sur les trottoirs. Et je ne parle pas de jouer les clochardes…


Des jours plus tard, elle se retrouva devant un énième miroir avec un type qui lui tirait les cheveux dans tous les sens, s’envoyant des fleurs à voix basse. « Le flou sur le front, voilà, parfait. On dégage des mèches, décoiffées, ‘Belle des champs’, fantastique. Le reste flotte sur les épaules, voilà, j’ajuste, je donne de la couleur, c’est presque terminé… » On l’interrompit en lui criant de se dépêcher. Il grogna, tripota la coiffure pendant encore trois minutes avant d’éjecter Nina du fauteuil et d’aboyer sur l’habilleur. On enveloppa cette fille tremblante de voiles marines, blanches, dorées, avant de lui mettre des pantoufles pour le trajet et de la pousser dans l’escalier.

Quand elle ouvrit la porte, elle s’arrêta. D’abord, parce qu’elle ne voyait rien – il y en a un qui bidouillait un projecteur et lui envoyait la lumière en pleine face – ensuite, parce qu’un courant d’air glacé s’était infiltré sous les tissus. ‘Qu’est-ce que je fais là ?’ Elle fit quelques pas à l’aveuglette avant que sa vue ne revienne à la normale. Des cercles clignotaient devant ses yeux, effet d’éblouissement. Puis elle découvrit le toit. Les lumières. L’humidité. Qui avait eu l’idée de pondre un thème pareil ? Elle avait froid, faim, envie de rattraper sa nuit. L’agacement la piqua à la vue de la Tour Eiffel, puis enfla d’un seul coup quand elle aperçut la silhouette du photographe : les restes d’une humiliation. Elle pensa à n’importe quoi pour évacuer : les pâtes restées dans le micro-ondes, un cours de salsa, le chèque qui suivrait, la douceur des pantoufles sous ses pieds. Loucha sur une cigarette. C’était foutu. Quand elle croisa le regard de Laurence Petersen, elle ne souriait pas. En fait, ses yeux le disaient clairement : Ne me demande surtout pas de sourire.


Dernière édition par Nina Morineau le Mar 26 Jan - 19:49, édité 2 fois
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Laurie Petersen
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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyLun 25 Jan - 23:01

« Mr Petersen, your model is here »

Vestale. Il n’aurait pas cru si bien dire. En voyant Nina, il se serait vraiment cru dans une Grèce antique flinguée par le grisâtre du décor Parisien.

S’approchant de la jeune femme qui affichait un air qu’il aurait qualifié de « vierge effarouchée », il entreprit de la contempler pendant plusieurs secondes, une main attardée dans ses cheveux châtains qu’il ne pouvait se convaincre de couper.

Le visage impassible, il acheva son inspection par un signe de tête en direction d’une assistante qui, attrapant la jeune brune par la main, la dirigea vers le premier point de vue, près d’une rambarde dont l’état était plus que précaire.

« Alors tu poses une main ici, sur la barre. Voiiilà. Et maintenant, lèves la tête. Aie l’air naturel. Mince, mais c’est qu’il pleut fort! »

Doris Martin, assistante de Laurence depuis quelques mois, était une femme joviale, affable et mère de quatre enfants. La plupart du temps, elle se débrouillait pas mal pour traduire aux modèles ce qu’exigeait Laurie. Ce dernier n’avait jamais compris pourquoi elle avait choisi ce métier au lieu de se consacrer à quelque chose qui ne consisterait pas à materner des post-ados en mal de reconnaissance et à l’ego surdimensionné.
Enfin, elle était assez habile pour éviter au photographe des paroles superflues ce dont il lui était reconnaissant.

La pluie continuait à tomber, comme l’avait dit Doris quelques secondes plus tôt.

« Enough » murmura-t-il en se dirigeant vers la jeune femme, son appareil déjà installé sous un espèce de parasol destiné à la protection des objets précieux de leur seigneur et maître.

L’assistante s’éloigna. Le regard de Nina était dur. Elle le voyait comme un ennemi. C’était ridicule. Ça flinguait ses photos. Une vestale en colère ne pouvait être parfaite. Il lui fallait de l’innocence. Il lui fallait de la bienveillance.

S’accroupissant devant son appareil, il la cadra. La pluie faisait des merveilles, rendait le décor presque féerique. Il prit une photo.

« Ok… Listen. Écoutes ».

Il avait apprit à parler français très jeune. Il n’appréciait pas vraiment en faire usage, estimant qu’il était assez généreux de s’adresser aux gens en anglais et non dans sa langue maternelle, le danois. C’était une manière de pensée ridicule, mais tout à fait sensée, lorsqu’il y pensait. D’autant plus que les français paraissaient avoir une aversion pour les langues étrangères. Mais soit, autant qu’il s’en serve. Autant qu’il montre à la jeune femme un minimum de sympathie.
Lorsqu’il voulait obtenir quelque chose, Laurie savait s’y prendre :

« Tu ne m’aimes pas. Je m’en fiches. »

Bon début de tentative de socialisation, Laurie. Un peu plus et on te décernait le prix Nobel de la paix.

« Imagines toi quelqu’un d’autre. Je suis ton ami, ton boyfriend, ton chien, quelqu’un qui calme, qui fais rêver. Anybody, i don’t care. Tu as choisi ce job, tu es mon vestale, tu poses pour moi, alors tu poses bien, okay? »

Il l’avait choisie parce qu’elle l’intéressait. Parce qu’elle avait du potentiel. Parce qu’elle était insupportable, mais c’était une option. Une forme de masochisme. Il n’était pas là pour lui apprendre à poser, non? Combien avaient posées devant lui sans encombre? Alors qu’il parlait, ses doigts manipulaient l’appareil photo, tentant de capter les sentiments que la jeune femme semblait refuser radicalement de montrer. Fatiguante.
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Nina Morineau
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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyMer 27 Jan - 0:11


Il pleuvait, en plus. Cerise sur le gâteau. Pas grand-chose à la sortie de la cage d’escalier, mais une bruine désagréable dès qu’on l’attira un peu plus loin, là où on voulait qu’elle soit, contre une rambarde décrépie. Elle s’était laissée déplacer comme la marionnette qu’elle était, apaisée pendant les deux secondes où on l’avait prise par la main, plaignant presque cette pauvre assistante qui se coltinait chaque jour les humeurs de Petersen. Elle se souvenait d’elle, lors du premier shooting. Elle avait bataillé un moment pour faire comprendre ce qu’elle voulait – ce qu’il voulait – à ces filles qui parlaient à peine anglais et au final, une fois que la barrière de la langue avait été dépassée et que le message avait fait son chemin, c’était à Nina qu’il avait fallu tout réexpliquer. Sans succès. Doris ne s’en souvenait probablement pas, mais les autres présents sur la scène, oui. Photographe irrité y compris.

Le souvenir flottait dans la brume, se tordait entre les gouttes mais restait bien ancré dans le cerveau de Nina, au fond de ses yeux et jusqu’au bout de ses pieds glacés contre le béton. La pluie allait faire hurler le coiffeur. Elle paraissait mettre tout le monde sur les nerfs, en fait, puisque c’était l’élément le plus redouté lors d’un shooting extérieur – tout le monde, sauf Laurie, qui restait calme. Trop calme ? Ça l’énervait encore plus, cet apparent je-m’en-foutisme. Et impossible de faire disparaître l’antipathie. Ce qu’il tenta d’atténuer, pourtant.

- Ok… Listen. Écoutes. Tu ne m’aimes pas. Je m’en fiche. Imagines toi quelqu’un d’autre. Je suis ton ami, ton boyfriend, ton chien, quelqu’un qui calme, qui fais rêver. Anybody, i don’t care. Tu as choisi ce job, tu es mon vestale, tu poses pour moi, alors tu poses bien, okay ?

Pas de réaction. Pas envie de t’imaginer en quelqu’un de supportable, pas envie de penser à autre chose pour tout rendre plus facile. Ça ne marche pas. D’habitude, le photographe n’existe pas, il est neutre, planqué derrière son appareil. Je ne sais même pas ce que tu fous là.

Elle détourna les yeux. Respira profondément, comme pour se conditionner à jouer les prêtresses – ou pour exprimer son ennui, au choix. Prit sur elle, et finit par lâcher dans un marmonnement :

- Ça n’allait pas non plus la dernière fois.

Alors pourquoi s’acharner. Il y a tellement de mannequins à photographier sur les toits de Paris, des mannequins qui ne t’ont jamais insulté et qui n’auront jamais envie de te gifler… Il fallait le faire, quand même. Il fallait oser en redemander après le désastre de la dernière fois, en sachant que ce n’est plus du piston déguisé, mais du réel, le genre qui ira filer entre les pages d’un magazine dans un petit mois.

Bienvenue chez les artistes ?



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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyMer 27 Jan - 22:02

Vous voyez? Vous vous rendez bien compte que Laurie faisait de son mieux pour que cette séance se passe bien. En fait, le photographe faisait toujours de son mieux pour que les shootings se passent bien. Il aimait son métier. Il aimait bosser. Il aimait être parfait.
Alors, lorsqu’il s’entendait dire et je cite « ça n’allait pas non plus la dernière fois »…
Bon. Il en avait connues, des fortes têtes. Des mecs qui refusaient d’enfiler tel ou tel costume, d’escalader tel ou tel échafaud, ou d’embrasser telle ou telle nana, sous prétexte qu’elles n’étaient pas à leur goût. Il en avait connues, des pimbêches qui refusaient de poser nues, qui voulaient une assurance avant de sauter dans le vide, qui harcelaient la pauvre Doris en demandant au dernier moment une putain d’augmentation.
Mais ensuite, devant l’appareil, tout allait bien. Ils souriaient, ils pleuraient, ils jouaient la comédie. Ils s’embrassaient, ils s’aimaient, ils lançaient des éclairs. Bref, ils respectaient les souhaits du photographe. Ils n’agissaient pas en enfants gâtés. Ils n’étaient pas récalcitrants à l’idée de poser pour lui.

Un regard fut lancé à Doris. Un regard qui disait « je suis fatigué».  Il fallait qu’il garde son calme. C’était lui qui l’avait choisie. Il la voulait. Elle était parfaite pour ce shoot il l’avait déjà dit, mais c’était le genre de détail qu’il fallait répéter. Le genre de chose qui lui permettait de se convaincre lui-même.

Laurie, c’était un mec conciliant, mais fallait pas non plus se foutre de sa gueule. Et en cette seconde, il était près à exploser.

Doris était venue à coté de lui. Elle n’aimait pas ce regard. Elle ne comprenait pas ce qu’avait la petite. Elle ne faisait pas d’efforts pour plaire à Laurie Petersen.

Ce dernier avait tourné le dos au jeune modèle. Ça n’allait pas. Ils étaient dans le même espace depuis moins de dix minutes et déjà, ça l’allait pas. Il sortit le petit boîtier en cuir qui contenait ses cigarettes. En glissa une entre ses lèvres, l’alluma. Il avait besoin de se calmer. Quand ce fut fait, il refit face à la jeune femme a qui quelqu’un avait sans doute donné une couverture. Bientôt, on allait dire que c’était elle, la victime. Il vint se dresser devant elle. La toisa d’un air mauvais. Elle lui faisait perdre son sang froid et il détestait ça. Marque de faiblesse.
Sa main vint tirer d’un coup sec le lainage qui lui couvrait les épaules, qu’il fit passer par-dessus la rambarde. La pluie était toujours là :

« Montre moi ta putain d’innocence. Si ça ne marche pas avec moi ça ne marchera avec personne. Fais ton putain de job. »

Il tourna les talons. Reprit son appareil. Il était énervé, il détestait ça.
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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyDim 7 Fév - 19:56


Son propre cauchemar. C’était ce qu’elle était en train de devenir. À peine un mois de l’autre côté du miroir et la gentille Nina qui se laissait marcher sur les pieds avait presque fondu au soleil. Trop de rancœur. On n’efface pas des années de passivité sans y laisser des plumes : la vie, la vraie, sans bulle et sans coussin, fait mal. Et tous ces gens qui la poussaient en avant allaient finir par la briser. C’était peut-être une bonne chose, au final.

Pendant cinq secondes, prétentieusement, elle se crut forte. Elle ne voulait pas obéir et n’obéirait pas, ça semblait facile : Petersen avait abandonné son appareil photo et une autre assistante lui avait tendu une couverture, compatissante – ou juste méprisante et forcée de ne pas le montrer. Mais ça ne pouvait pas durer éternellement. Elle n’était pas forte. Résistait contre du vent. Finirait par se reprendre ses caprices en pleine gueule. D’ailleurs, le boomerang revenait déjà à vitesse grand V : elle avait à peine eu le temps de se réchauffer qu’en deux pas, Peterson s’était plantée devant elle, lui arrachant la couverture des épaules. Elle n’avait eu le temps de penser qu’à sa fierté de pacotille, à rien d’autre. Se mettre à la place de tous ceux qui poireautaient dans le froid, elle ne savait pas faire, pas plus que de se remettre en question, se concentrer, oublier que c’était un passe-temps temporaire pour elle et un métier pour les autres. La fatigue, l’énervement, la pluie la gelaient sur place. Un vrai glaçon, au propre comme au figuré. Alors quand elle vit le photographe écraser sa cigarette, quand elle leva les yeux et croisa ce regard-là, ce fut pire que du dégoût qui lui tordit le ventre. Bizarrement, ce fut de la peur.

- Montre-moi ta putain d’innocence. Si ça ne marche pas avec moi ça ne marchera avec personne. Fais ton putain de job.

Ce n’était pas la vulgarité – ça, Nina connaissait – mais plutôt l’humiliation, bien méritée cette fois, qui la terrassa sans prévenir en écrasant sa révolte dans l’œuf. Un peu comme les rares fois où des professeurs l’avait engueulée parce qu’elle bavardait trop : au lieu de s’indigner, elle se recroquevillait et obéissait sagement jusqu’à la fin du cours. C’était le même schéma, version adulte : en haussant le ton, il l’avait remise à sa place. Pas totalement bien sûr, les miracles n’existent pas, mais pour un temps, jusqu’à la prochaine contrariété.

Elle se calma en trois secondes. Le temps de songer à partir – le genre de pensée qui s’évanouit aussitôt, trop compliquée et comprenant trop de conséquences pour être sérieusement examinée – de jeter un œil en direction de la sortie et de lever un pied. Trois secondes, puis elle posa la main sur la rambarde et s’envola ailleurs. S’évapora, et laissa une coquille vide. De l’innocence, là, tu en auras.
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MessageSujet: Re: Je ne t'en veux pas - Nina Je ne t'en veux pas - Nina EmptyMar 9 Fév - 23:30

Laurie la mitrailla. Derrière lui, un assistant vérifiait une par une les images qui arrivaient sur l’écran, protégé par une bâche de fortune. La pluie continuait à tomber autour d’eux. Les membres de l’équipe avaient repris leur souffle : le photographe ne s’en était pas pris à eux. Doris, quand à elle, notait avec nervosité des observations sur des choses qu’elle était seule à voir. Le mannequin ne bougeait pas : Nina était immobile, les yeux fixés dans un point précis. Son visage était détendu. Les vêtements légers qui flottaient légèrement autour d’elle, emportés par le vent, donnaient de la vie au paysage. Pour le coup, sa vestale s’était muée en statue de sel.
Des murmures approbateurs se faisaient entendre derrière lui. Pourtant, il manquait toujours quelque chose. Peut-être aurait-il dû choisir quelqu’un d’autre? Oui, sans doute. On pourrait trouver une autre fille dans la demi heure qui suivrait. Oui, mais… Ne serais-ce pas admettre qu’elle avait eu raison? Elle n’était pas dynamique. Elle n’était pas bavarde. En réalité, elle ne paraissait absolument pas prendre plaisir à son travail. Pourquoi avait-elle signé? Lubie de gamine, sans doute. Tentative d’impressionner les copains. Il s’était trompé. Elle n’était pas intéressante, finalement. Une erreur. Était-il vraiment possible que Laurie Petersen ait fait une erreur?

Non, bien sûr que non.

Pourtant, déjà, il s’éloignait de son appareil photo. Glissait une cigarette entre ses lèvres. Encore une. Se dirigeait vers la sortie. Se glissait derrière la porte, en la claquant violemment. Putain, ça, ce n’était pas voulu. Il fallait qu’il se défoule. Il voulait bien comprendre qu’on ne l’aimât pas, mais qu’on refuse de bosser avec lui…!
Il fallu passer par les loges. Tiens, un vase. Il le balança contre le mur. La porte s’ouvrit au même moment. C’était Doris :

« Oups »

Bien sûr, il ne montrerait pas qu’il était énervé. Pas pour cette raison. Pas à cause de cette petite conne. L’assistante poussa un soupir, referma la porte qui crissa sous les petits morceaux de verre qui s‘étaient glissés en dessous. Observa quelques secondes le désastre, les violettes étalées sur le sol, si difficiles à trouver en cette saison. Osa une remarque. Déclancha une réaction de l’artiste, qui s’était fondu dans un fauteuil qui s’était trouvé là par hasard, alors qu’il reculait, la cigarette toujours aux lèvres.

« Deux fois. C’est la deuxième fois. Je ne peux pas. Trouve quelqu’un d’autre »

Oui, bon ben t’es mignon, mais il est déjà 21 heures, j’ai les gosses qui attendent à la maison. Le taxi va prendre 2 plombes avant de venir et en plus, l’agence est fermée. Je t’avais bien dit que la petite, elle avait pas assez d’expérience, mais tu crois toujours tout savoir. Maintenant, ton fichu shooting, tu le fais, mon ptit Laurence. Songea l’assistante, dont le flegme habituel était en train de s’émousser.

« Elle est nouvelle, c’est tout. Elle ne sait pas comment faire… »
« Elle ne VEUT pas faire »

Tout le monde paraissait prendre sa défense. Il ne comprenait pas pourquoi il devait argumenter alors que le sujet était clos. Il ne pouvait pas se permettre de présenter des photos flinguées à la presse. De plus, il était terriblement vexé que cette fille ne l’apprécie pas. Tout le monde se pliait en quatre pour Petersen. Ou faisait semblant. Elle, paraissait le trouver injuste, comme si il était le dernier des monstres. Non, le pire n’était pas cela. Le pire, c’était qu’elle ne l’aimait pas alors qu’il faisait des efforts. C’était juste ridicule.

« On ne dit jamais deux sans trois, Laurie… »

Soupir de l’interpellé.

« Je suis fatigué. Tu peux partir. Partez tous. »

Doris tourna les talons, un sourire aux lèvres.

« Sauf elle. Qu’elle vienne ici. »
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