Ann Traur - Heartless, me ?

.

Le Book : l'outil du parfait petit mannequin.

.

Ann Traur - Heartless, me ? Dianekruger001

TRAUR Annika, Eva
ft. Diane Kruger ▬ (c) citylove-gallery

Annika Eva Traur est née le 11 Octobre 1980 à Berlin, dans un petit quartier défavorisé de la capitale. Fille d'un chômeur alcoolique et d'une caissière, elle a grandi dans le bitume. Elle avait un frère, disparu après une brillante carrière dans la vente de drogues.
Ann Traur est née à Paris, l'année de ses seize ans, d'une site de photos publié par son petit ami de l'époque, qu'une agence de mannequinat fit sortir du néant, un jour d'heureuses coïncidences. Âgée désormais de vingt neuf ans, elle vit seule et profite de sa renommée pour coucher avec les futures égéries du nouveau siècle.
Ann fait partie du " top of the top ". En réalité, elle sublime par sa carrière le " top " lui même. Entre Dior, Prada et Channel, vêtements, parfums et campagne de publicités, elle a vu passer toutes les occasions dont un mannequin puisse rêver. A ce jour, sur le point d'entrer dans la trentaine, elle atteint le paradoxe de l'âge : son nom est sur toutes les bouches, mais son avenir est mis en cause. Y a t'il une catégorie pour le troisième âge dans le monde de la mode ?

trente-huit covers et trois cent soixante cinq défilés suffiront ils à combattre les médisances que la presse fait courir à son encontre ?.

- Taille : 1.74 m
- Mensurations : 84-59-89 (EU)
- Pointure : 39 (EU)
- Vêtements : 36 (EU)
- Cheveux : Blonds
- Yeux : Bleus.

C'est ce qu'on pourra lire d'elle sur son curriculum vitae, son dossier, presque ses cartes de visite. Des mensurations que toutes les filles rêveraient de posséder et qui n'ont presque pas bougé depuis le début de sa carrière. Sont elles suffisantes ? Peut être, tout dépend du point de vue. Une chose est certaine, les agences s'en contentent bien... pour les premiers tours de sélection, du moins.
Ann est belle au delà de quelques chiffres. Elle possède une élégance ancrée jusque dans sa moelle, un port princier et un art de la gestuelle absolument parfait. Elle est ce genre de femmes qui ne se contentent pas d'attirer le regard, mais le captivent au contraire, et l'arrachent à son propriétaire jusqu'à n'en faire plus que des cendres. Le bleu de ses yeux est profond, intense, capable de glacer encore d'avantage la blancheur de givre que revêt son derme. Son sourire est tout en subtilité, tout en grâce, de ceux qu'on ne parvient jamais à déchiffrer vraiment. Plus jeune, son visage était celui d'un ange. Désormais, il revêt les traits des reines de glace. Mais cette beauté est elle entière ? Éternelle, peut être ?
Il suffirait de la regarder pour comprendre que non. Là est toute l'ironie de son existence : une seule personne a jamais daigné la voir et cette personne est partie depuis longtemps. Au delà du fantasme, des magasines et de la bonne tenue se dissimule une fatigue terne. Le soir, privée de son maquillage, Ann a les yeux fatigués et des rides de tristesse au coin du regard. Sa beauté, elle la considère comme fade, tout juste bonne à lui donner envie de vomir. Ann n'est pas heureuse, elle ne l'a jamais été longtemps. Et qu'est la magnificence d'un corps sans la fraîcheur de l'esprit?

"Aucune grâce extérieure n'est complète si la beauté intérieure ne la vivifie. La beauté de l'âme se répand comme une lumière mystérieuse sur la beauté du corps."
Victor Hugo.

.

Be a real model or not ?

.

○ Un sacré caractère ; Ann est une égérie de la mode et elle joue parfaitement son rôle.
Froide, émotionnellement psychorigide, elle peut remercier son superbe corps de pallier à l'absence cruelle d'humanité qui transcende de son être, même lors d'ébats amoureux. En intimité, c'est elle qui mène la danse, envers et contre tout, et ses conquêtes ne peuvent que se plier à sa présence ou prendre la porte. En société, elle adopte une attitude digne et autoritaire, qui ne laissera jamais place à la moindre erreur dans son programme, même lorsqu'il s'agit du dosage de son café crème. Organisée, professionnelle, mademoiselle est un dragon dissimulé dans une enveloppe fragile et angélique, de ceux qui ne hausseront jamais le ton mais n'en manqueront pas moins de terrifier leurs interlocuteurs. Elle ne rit presque jamais, préfère esquisser un sourire discret. Toutes les personnes possédant des qualités simplement humaines seront abasourdies par son attitude frigide, et très rares sont celles à qui elle arrachera un semblant de sympathie. Monstrueuse, Ann n'est que le reflet d'une carrière brillante... et déchirante.
Mais s'il est une chose qu'on lui doit, c'est du respect. Aucune situation problématique ne trouvera impasse avec elle, jamais un ennui ne sera réglé au delà des limites règlementaires. Elle est élégante, soutient bon nombre de causes et de projets humanitaires, les seuls qui semblent lui tenir à cœur aux yeux du monde et de la presse. Quand ils ne soulignent pas son âge, les journalistes la peignent comme un vraie femme du monde, ambitieuse et pleine de charisme, de celles qui n'accepteront un refus que s'il est présenté rigoureusement. Elle a le sens des valeurs et de la décence, chose qui lui a permis une telle longévité dans le showbuisness.
Mais laissons là les façades surfaites. Lorsqu'elle est seule avec elle même, soit la plupart du temps, Ann est une telle déchirure que le plus cruel des hommes se verrait arracher de la compassion en sa présence. Ruinée, sa vie ne lui inspire plus qu'un copieux mépris, l'aspect le plus écœurant étant sa carrière si parfaite. Pourtant, elle s'y accroche comme une sangsue, persuadée que si on la lui retire, elle ne sera plus rien qu'un corps sans âme. Digne dans sa douleur, personne n'a jamais pu en voir les profondeurs abyssales. Mais c'est un fait, Ann a besoin d'être sauvée d'elle même. Et elle ne l'admettra jamais.

○ Avec des bons côtés... ; Quand de jeunes adolescentes viennent s'enquérir du monde enchanté qu'est le mannequinat à leurs yeux, j'aimerais pouvoir leur dire de faire marche arrière. Je voudrais crier à leurs parents de retenir l'innocence de ces enfants tant qu'ils le peuvent encore et de ne pas laisser la pourriture leur arracher la jeunesse trop vite. Mais je ne peux pas. Je me contente de leur sourire, affirmant que ce n'est pas qu'un métier, c'est un rêve qui se réalise. Et en un sens, c'est vrai. Quant au prix qu'il faut payer pour réaliser ses rêves... au moins, dans ce milieu, on trouve quelques compensations.
Un mannequin est au dessus des lois pour beaucoup de choses, bien plus qu'un ministre ou un président. La drogue et l'alcool lui sont fournis comme des petits fours. Il ne payera jamais une contravention pour excès de vitesse, surtout si c'est une femme. Ses horaires sont complètement aléatoires, et chaque minute rapporte plus d'argent qu'une victoire en bourse. Il fait le tour du monde à l'œil et à chaque fin de fashion week, pourvu qu'il soit célèbre, il peut partir s'isoler jusque sur les plages de Miami pour se remettre de cette dure épreuve. Une vie de mannequin est totalement dénaturée, dans le bon comme dans le mauvais. Qui ne rêverait pas d'être un jour face à la tour Eiffel et le lendemain sur la baie de San Francisco ?

○ ... Et des mauvais côtés ; Il y en a tellement et pourtant si peu...
Devenir mannequin, c'est se faire arracher une partie de ce qu'on appelle " humanité". Les personnes que l'on se condamne à croiser chaque jour ne vous traitent plus que comme de la marchandise, même si c'est de la marchandise de luxe. La pression, les exigences, les heures interminables de travail peuvent vous sucer votre énergie si vous n'y prenez pas gare. Et quand l'un de vos responsables daigne s'attendrir et vous suggérer des vacances, il vaut mieux l'écouter, faute de sombrer complètement. Dans ce métier, il n'y a aucune stabilité, aucun confort, tant sur le plan affectif que sur le plan professionnel. Chaque jour est une lutte pour imposer son image et faire régner son titre. Quant à la drogue, elle est une menace constante, perpétuellement sous votre nez. Beaucoup de gens prometteurs ont sombré sous les frappes du mannequinat. Sans un mental d'acier et une ambition intraitable, les feux des projecteurs vous brûleront vif.

.

Les caprices de star...

.

○ Domaine(s) de prédilection ; : Défilés de haute couture, avec une préférence connue pour Prada. Photos de charme et shoots réguliers pour des ventes humanitaires. Manifestations à visée caritative également. Quelques publicités pour parfum ont été faites et grandement appréciées, mais les occasions ne sont pas fréquentes.
○ Domaine(s) en vue ; Plus grand chose, malheureusement. Prête à porter classe sénior, peut être ? Et plus sérieusement, défilés en maillot de bain manquent un peu au palmarès.
○ "I had a dream"... ; Clouer définitivement le bec de la presse en sublimant la carrière de tous les mannequins qui existent, ont existé ou existeront. Immortaliser le nom d' "Ann Traur " à jamais comme celle qui aura ridiculisé les prédictions des journalistes.
○ S'il y a bien un magazine de mode ; Vogue et éternellement Vogue. Classique, infaillible, d'une qualité extrême et qui n'a jamais déçu les attentes de la population.
○ Les côtés cool de la popularité ; Eh bien il n'est pas déplaisant de ne payer aucune contravention. Ou encore de se faire interpeler en plein rue pour s'entendre dire que quelqu'un rêvait par dessus tout de nous rencontrer. Le fait de pouvoir influencer l'opinion publique sur l'importance de certaines actions est agréable également, bien qu'il soit particulièrement cynique quant à la nature humaine. En un sens, même si la popularité à le désavantage de ne nous laisser aucune vie privée, elle est amusante lorsqu'on a tiré un trait sur la notion d'intimité avant qu'elle ne s'emmêle pour de vrai.

○ Vive la colocation... ; Affreusement contrariante. Se voir imposer la compagnie d'un amateur ou d'une étoile montante dont la tête grossit en même temps que le porte monnaie est très ennuyeux. Mais pourvu que cette personne se démarque un peu du lot et soit une compagnie agréable, pourquoi pas ? Ça aide à tuer le temps et la solitude.

.

La face cachée : le joueur.

.

Que dire... je suis une jeune fille de 19 ans, relativement normale hormis cette passion d'écrire qu'on me reproche souvent. Je suis en médecine, dans l'est de la France, j'aime le chocolat, le luxe et la littérature par dessus tout, bien que je consacre un peu de temps à l'amitié et autres broutilles ( oui, c'est du deuxième degré =). Mais j'aime vraiment le luxe et la littérature). Bref, les soirées, les amourettes, les études, tout ce qu'un jeune adulte est censé vivre avant de s'assagir.
J'ai une passion pour la psychologie. Aussi vais je vous surprendre, mais je n'y connais rien à la mode. Je n'ai aucune idée des modèles dont vous parlez et je me sens même carrément dépaysée. Mais je me suis dit que le monde instable du mannequinat était un endroit rêvé pour développer la psychologie du personnage que je suis entrain de créer ici même.
Ah si, je connais Kate Moss, je lui trouve un certain caractère et un charme non négligeable. J'ai suivi dans le grand journal la percée d'un visage de Dior, Mylène Jampanoï, actrice exceptionnelle. Mais je suis sûre que Vlada Roslyakova est également très respectable. Et comme toutes les nanas, j'ai déjà lu au moins un Cosmopolitain en buvant de la vodka et en bouffant des chips. Et j'adore acheter des vêtements, chers de préférence.
Bref, par pitié, ne me virez pas !

"Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !
A. De Lamartine

Berliner Tageszeitung , le 27 Décembre 1996 :
" Le quartier de Marzahn est encore sous le choc des coups de feu qui le secouèrent la nuit du 24 Décembre dernier et qui provoquèrent la mort de trois jeunes citoyens allemands (...). D'après les autorités, ils étaient impliqués dans un important trafic de cocaïne qui leur aurait ce soir là coûté la vie. (...) " même dealer de drogue, un enfant de mérite pas de mourir ", déplore Katerin Traur, la mère de Franck Traur. " Il n'avait même pas dix huit ans. "
(...) "

- Je suis désolé pour ton frère.

Engourdie par d'amoureuses langueurs, Annika tourne un sourire tendre vers son amant. Sa main vient frôler son visage crispé d'inquiétude, caresser les rides qu'il s'est infligées au coin de l'œil. Lentement, elle laisse glisser sa joue sur son torse, pour enfin laisser échapper un doux murmure.
- Mon frère a fait ses choix.

Manek esquisse un sourire à son tour, soulagé, et resserre son étreinte sur le corps de la belle, nichant son nez au creux des cheveux blonds qui s'épanouissent sur les draps. Leurs corps, encore moites de s'être longuement embrassés, s'épousent en un amour plus chaste, au milieu d'un silence qu'ils n'ont pas besoin de rompre. Autour d'eux, fauteuils rétros et autres lampes à lave s'entassent dans quelques mètres carrés. Le studio dégage une odeur de vieux bois et de poussière, dans laquelle de nombreuses photographies exhalent leurs parfums intimes. En contemplant clichés sur les murs, on peut sentir l'herbe fraîche des dimanches après midi, les feuilles d'automne et ces milliers de pots d'échappements dans les rues de la ville. Amoureuses de ces paysages, Ann ne résiste pas longtemps à la tentation de se retourner pour les regarder encore. Un sourire bienheureux sur les lèvres, elle caresse machinalement le bras sur lequel elle repose et inspire ces effluves imaginaires avec fascination.

- Tu vas devoir me libérer si tu veux recevoir ton cadeau de Noël. murmure t'elle, alanguie.
- Mhmm cruel dilemme.

Les lèvres du jeune homme contre sa nuque lui arrachent un frisson extatique. Elle le laisse savourer la courbe de sa mâchoire sans résistance, tout juste un rire mécontent lorsque sa barbe naissante lui chatouille l'épaule.

- Vas. soupire t'il en desserrant son emprise. Je suis vénal et je veux mon cadeau.

Mademoiselle roule excessivement les yeux dans ses élégants orbites et s'extirpe paresseusement des vieux draps, consciente du regard qui se pose immédiatement sur sa robe de chair. Le regard de Manek est ce qu'il a toujours eu de plus intense. D'un brun prononcé, relevé par les négligences de sa barbe, celui qui vous transperce l'âme et vous abandonne, dévasté, à une fascination irrépressible. Ce regard qui suscite en Annika tant d'émoi chaque fois qu'il daigne se poser sur elle. Déjà, alors qu'elle lui tourne le dos, elle rougit de le sentir glisser sur son corps, contempler le galbe de ses fesses et admirer la blancheur de son derme. Il a pu lui faire l'éloge de sa beauté des dizaines, des centaines de fois, elle sent encore comme au premier jour cette honte horrifiante de ne plus être à la hauteur de ses qualités. Le trouble constant que nous inflige le grand amour quand il devient pleinement vécu.
Elle extirpe de son sac un paquet coloré, qu'elle fixe tout le long du retour, gênée. Ce constat fait sourire Manek, mais il ne dit rien, et se redresse pour l'accueillir lorsqu'elle vient s'agenouiller devant lui. Fébrile, Ann lui tend son présent, puis se tortille maladroitement les doigts en l'observant l'ouvrir. Malgré tout, la stupéfaction béate qui fige les traits et la respiration de son Ami la comblent de fierté, elle bombe le torse pour accuser cette réaction avec honneur.

- Tu...
- Ca te plaît ?
- Je ne peux pas accepter enfin. Ann...
- Mais si, bien sûr que si.
- Où as tu trouvé les moyens d'acheter une chose pareille?
- En travaillant. Tiens regarde.
Elle pose son doigts sur les inscriptions qui constellent la petite boîte.
- C'est du numérique. Ça veut dire que tu peux mettre les photos que tu prendras sur ordinateur. Comme ça, tu vas pouvoir créer ton site et te faire connaître.

Un émerveillement incrédule s'empare du jeune homme. Il aimerait refuser, elle le sait bien, mais il n'osera jamais. Avec les précautions d'un moine ouvrant de vieilles reliques, il extirpe l'objet de son emballage et le fait tourner entre ses doigts, aussi experts qu'avides. Il déglutit en observant chaque ligne, chaque bouton, avec une fascination qui concurrencerait presque celle qu'il voue d'ordinaire à sa bien aimée. Incapable d'attendre que la notice soit examinée, il allume l'appareil et le pointe vers elle. Aussitôt, elle se cache, mais cela ne le dissuade en rien de prendre sa toute première photo et de l'admirer durant de longues secondes.

- Regarde, elle s'affiche. Non mais regarde moi cette qualité d'image ! Y combien de pixels là dedans bordel de Dieu ? C'est...

Brusquement, il bondit. Annika sursaute. L'aurait elle rendu fou ?

- Il faut qu'on l'essaye tout de suite. s'exclame t'il en s'extirpant des draps, nu comme un ver. Regarde l'objectif.
- Non, attends, Manek...

Mais il la bombarde déjà de clics et d'éloges. Gênée de prime abord, obligée de masquer sa poitrine et de lancer à l'appareil un visage implorant, échevelé, elle ne tarde pas à se prendre au jeu. Les airs chastes, les réprimandes courroucées, les éclats de rire et les pauses énamourées se succèdent en cet après midi d'hiver, que désormais plus rien ne saurait gâcher...

" Et si l'humble garni qui nous servait de nid
Ne payait pas de mine,
C'est là qu'on s'est connu, toi qui criais famine
Et moi qui posais nue.
La bohème, la bohème...
Ça voulait dire on est heureux "
C. Aznavour

- Tu es sûr de toi ? Je veux dire... Ça ne va pas passer pour du détournement de mineur ?
- Tu dis toi même que ta mère ne réagit jamais assez. Alors pourquoi une fugue à Paris serait elle inquiétante ? Et puis tu as laissé un mot non ?

La sujet est esquivé avec une nonchalance agaçante. Ann pousse un soupire bref, elle détourne son regard du dos de son petit ami, résolument tourné vers l'affichage des trains. D'un œil inquiet, elle observe la foule qui se mêle au milieu de la gigantesque gare, les voyageurs aguerris qui boivent leur café crème, les familles nombreuses qui traînent péniblement leur demi douzaine d'enfants à travers tout le hall. Ce monde, ce bruit, cette agitation, tout est bon pour la terrifier d'avantage. Un tournis la prend, elle resserre son vieux sac de cuir contre sa hanche. Vêtements débraillés, maquillage maladroit, c'est tout ce qu'elle a pu trouver pour cette escapade improvisée. Alors qu'elle va poser pour l'une des plus grosses agences de mannequinat en Europe. Elle déglutit péniblement.

- Et tu es sûr qu'ils voulaient que je t'accompagne ? C'est ton site tout de même...
- Le mail était clair. Ils t'ont adorée. Là, voie quatre. On y va.

Manek prend son propre sac et se lance dans la marée humaine. Au bout d'une seconde, elle ne voit déjà plus que son crâne, légèrement plus haut que la moyenne. Un nouveau soupir lui écorche la gorge, et Annika suit son homme jusque dans les entrailles de l'aventure...

- Tout va bien ?

Le train a démarré depuis une heure. Résolue à ne pas quitter le paysage des yeux, mademoiselle hausse vaguement les épaules. Ses mains tournent et retournent son portable d'occasion, attendant frénétiquement un signe de sa mère. Mais rien... peut être l'a t'elle déjà reniée. Depuis le divorce, il ne s'est pas passé un jour sans que Ann et sa génitrice n'encaissent une dispute, un froid, une allusion. A seize ans, obligée de gérer un quotidien à la place d'une femme sous antidépresseurs et menacée de renvoi, il est normal qu'elle ait souvent un ou deux reproches à faire. Malgré tout, elle aurait aimé lui parler. Expulser son angoisse. Comme n'importe quelle jeune fille de seize ans sur le point de passer le premier tour d'un recrutement de mannequins.

- Annika.

Le ton est plus autoritaire. Manek semble s'être débarrassé des étoiles qui lui brouillaient la vue. Elle baisse le regard sur son portable, au bord des larmes. Déstabilisé, il balbutie, lui passe la main autour des épaules, répète son prénom, plus doucement. Elle s'essaye à un sourire mais la tâche est herculéenne. Au bout de quelques secondes, sa voix s'élève, à peine audible.

- La seule personne qui ait jamais voulu me mettre sous les projecteurs à part toi, c'est mon père. Et ce n'était pas le genre de film qu'on présente au grand public... Comment veux tu que je prenne la chose sereinement?

Elle sent l'étreinte de son aimé flancher sous le poids de cette nouvelle donne. Un soupir s'échappe à nouveau, de regret cette fois ci. Elle en a déjà trop dit.

- Je n'y avais même pas pensé. Je suis désolée, je... tu veux qu'on fasse demi tour ? On peut descendre à la prochaine gare. Je peux arrêter le train en route si tu veux.
- Non ! Non, c'est ton rêve et je suis heureuse d'en faire partie. C'est juste que... Ces photos sont belles parce que c'est toi qui les as prises. Elle relève un regard honteux vers lui. Avec toi c'est facile mais... Je ne suis pas sûre d'être faite pour ça.

Ses yeux replongent sur ses genoux. Enfin, il la serre contre lui. Il la rassure. Comment pourraient ils ne pas l'aimer, sourit il. Ils vont l'adorer, renchérit il. Cette fois, elle sourit pour de vrai. Elle se blottit plus avant contre son épaule et s'endort. Sereine.

" Leurs ailes ont le goût de rien,
Mais nous volerons c'est certain.
Je connais des hirondelles. "
Soan.

- Annika Traur ?

L'accent ignoble avec lequel on prononce son nom lui écorche les oreilles. Elle se retourne vers l'homme qui l'interpèle et acquiesce timidement. Il semble juger avec étonnement l'accoutrement de mademoiselle mais rien ne sort de sa bouche sinon un " komm ! " qu'il a dû répéter de longues heures avant de pouvoir le dire spontanément. Angoissée, furieusement tentée de fuir, Annika le suit, avec la sensation de ne pas avoir assez d'yeux pour voir tout ce qui se passe autour d'elle.
C'est encore pire que dans le hall de la gare. Des dizaines de personnes courent au milieu des présentoirs de vêtements et aménagements de photographes. Ça crie fort, dans une langue qu'elle ne comprend pas et qui l'agresse encore d'avantage. Si Manek avait été là, elle aurait pu lui broyer la main, mais il est déjà parti se faire dévorer ailleurs.On la bouscule, elle doit s'excuser un nombre incalculable de fois. Son crâne a tôt fait de passer entre deux rouleaux compresseurs.
Ann et son guide franchissent une porte, puis une autre, pour enfin pénétrer dans une nouvelle cohue, uniquement féminine. Une douzaine de glaces s'enchaînent méthodiquement, chacune d'elle reflétant le visage d'une femme éblouissante de beauté. Derrière les candidates, des maquilleuses s'acharnent à leur redonner un peu de fraîcheur avec une précision violente. On la précipite sur une chaise. Obligée de contempler son visage fatigué par la route et sa coiffure informe, elle sent l'horreur la prendre. Tout ceci est une effroyable méprise.
Elle tente bien de l'expliquer à sa maquilleuse quand elle arrive, mais la barrière de la langue est visiblement trop difficile à franchir. Au bout de dix minutes d'agitations et de regard suppliant, pour laquelle les retouches n'ont aucun égard, elle s'affaisse sur sa chaise et renonce. Il ne lui reste plus qu'à se préparer psychologiquement pour la pire honte de son existence.

" Là, parfait. Tu es très belle. " sehr shön ". Regarde moi, euh... " look !, look at me ". Une vraie merveille. " Smile, komm, komm. " " Ja, sehr gut. " Une créature de rêve, c'est moi qui vous le dis.
Ce type n'a t'il pas fini d'écorcher trois langues simultanément ? Et ces flashs sont insupportables. Comment veulent ils que je puisse sourire ? Ils me foutent la trouille. Je sais même pas combien y a de personnes qui me regardent, je vois rien. Que quelqu'un me vienne en aide. " Smile. Penche toi. Euh... Bah penche toi quoi. " Qu'est ce qu'il a dit ? Ann regarde la mimique du photographe. D'accord, je me penche. Ce que cette robe peut être inconfortable. Manek, ramenez moi Manek si vous voulez que je " smile ", bande de psychopathes.

- Alors, ça c'est bien passé ?
- Euh... bah au moins je comprends l'expression " aveuglé par les projecteurs " maintenant. marmonne Ann en clignant des paupières. Et toi ?
- Super. Ils ont adoré mes portraits de toi. Je voulais me consacrer aux paysages, mais photographe de mode, c'est un bon tremplin.

Il rit. Alors Ann sourit aussi. Elle lui prend la main pour l'éloigner de ce lieu de cauchemars et réclame une visite de Montmartre. Puisque l'agence leur fournit une petite chambre en attendant la fin des castings, ils n'ont plus que ça à faire.
La ville des Lumières réveille leurs cœurs. La jeune fille est captivée par Montmartre, les portraitistes et les vieux bistrots, le verre de vin sur la terrasse. Ils avalent les marches comme des gosses, trouvent une petite exposition de Dali cachée sur un lopin de place. Ils avalent des montagne de pop corn et s'extasient devant la moindre vue offerte. Sur le toit du monde, Manek étire les bras devant le vide et hurle " Princes Of the Univers ", bel hommage rendu à Freddy Mercury, qui fait beaucoup rire sa compagne. Épuisés, ravis, ils s'assoient enfin près du célèbre manège et savourent la présence de l'autre en toute sérénité. Ann
sourit avec béatitude devant la beauté de son homme, qu'un soleil discret révèle bien plus sûrement que tous les maquillages du monde. Elle lève les yeux au ciel, sur un vol d'éperviers.

- J'aimerais tellement vivre ici. soupire t'elle. Dans un petit atelier; avec juste un matelas à même le sol et une kitchenette. Une salle de bain aussi, quand même. Juste ça. Et toi.
- On vivra ici. On va devenir célèbre chacun de notre côté, toi plus que moi parce que c'est beaucoup plus facile.
- Eh !
Elle lui assène l'épaule d'une frappe désapprobatrice. Ils rient, ensemble.
- Et je piquerai des crises de jalousie quand on te demandera de découvrir une jambe. Puis je profiterai de ta gloire pour aller dans les soirées où l'homme normal n'a jamais foutu les pieds. Et quand tu seras vieille et fripée...
- Tu m'abandonneras comme une vieille chaussette ?
- Voilà. Ou alors je t'enlèverai jusqu'aux Antilles. Et on brûlera notre fortune dans les hôtels de luxe. Et quand on sera ruiné, on reviendra ici, je deviendrai portraitiste et on récupèrera notre atelier. On vivra de rien, on retournera aux origines.

Le cœur d'Ann se meut d'un bonheur déraisonnable. Un espoir frénétique de cette vie rêvée. Elle ne sait pas encore qu'il ne faut jamais espérer trop fort...

******Le portable de la jeune fille résonne enfin du fond de sa poche, partiellement couvert par la rumeur de Montmartre. Avec un mot d'excuse pour son compagnon, elle se redresse et accuse le nom de sa mère sur le petit écran. Elle décroche, avec cette impression anxieuse de voir son rêve prendre fin.
- Maman ?
- Annika ! Je viens de lire ta lettre... Tu n'es pas sérieuse ? Où est tu ?!
- A Paris maman, grimace l'adolescente perplexe.
- Paris ?!! Mais... mais enfin...
- Écoute je sais que ça peut te paraître complètement dingue mais j'ai passé les castings et je dois bientôt y retourner pour le deuxième tour. Ce genre d'occasion n'arrive qu'une fois dans une vie et...
- Tu aurais pu m'en parler avant.
- Tu étais trop occupée à digérer tes médicaments, désolée.

Un silence glacé s'installe. Ann ferme les yeux, persuadée d'avoir prononcé la phrase de trop. Il y a encore quelques mois, son frère mourait dans une fusillade. Et la voilà exilée pour la capitale, sans considération pour l'autorité que pourrait avoir sa génitrice sur ce genre de décision.
- Désolée, je... Si tu veux que je rentre...
- Non. Tu finis ce que tu as commencé. Et après, tu prends le premier train. Tu m'as bien comprise ?
- Oui maman. Merci beaucoup.

Elle raccroche. Manek la toise, fébrile, inquiet. Mais le sourire victorieux qu'elle lui lance ne tarde pas à le faire exploser, à nouveau, de triomphe.
Ann ne prendra jamais aucun train. Elle et sa mère continueront de se parler par téléphone, mails ou par lettres pour garder contact lors de l'ascension de la jeune filles aux plus hauts podiums. La vieille femme lui rendra visite de temps en temps, et Ann partira, quelques fois, passer deux ou trois jours en Allemagne avec elle.
Katerin Traur décèdera d'un infarctus, cinq ans après ce fameux coup de téléphone.*****

"Une nuit je m'endors avec lui.
Mais je sais qu'on nous l'interdit
Et je sens la fièvre qui me mord
Sans que j'aie l'ombre d'un remords. "
V.Sanson

Vogue, le 18 août 1997 :
Une nouvelle étoile est-elle née ?
La question est sur toutes les bouches depuis que Ann Traur a fait son apparition lors d'une fashion week, juillet dernier. Fraîche, belle comme un ange et pleine d'une sensualité charmante, la jeune allemande a ravi le cœur des caméras autant que de ceux qui assistaient aux évènements. Douée d'un don pour fasciner l'objectif et ses spectateurs, ce mannequin en herbe n'a pas fini de faire parler d'elle. En page 6, quelques unes de ses prestations.

Annika referme violemment le magasine et bondit sur le matelas dans un hurlement sonore. Elle se vautre contre son petit ami pour l'immobiliser, le violente à coups de vogue sur le visage.

- Tu as entendu ça ?
- Oui, j'ai entendu. rit il, bon joueur. Et ils n'ont pas de place dans cette idiotie pour les photographes en herbe?
- Oh ne sois pas si rabat joie. Tout le monde se fout des photographes. Ça ne t'empêche pas de t'en mettre plein les poches.

Elle retombe brusquement sur le lit, feuilletant les pages pour observer ses photos, dont l'une porte la signature de Manek. Sans considération, elle lui colle devant la figure, partant dans un rire sonore, plein d'une allégresse nouvelle.
- D'accord d'accord d'accord. Il lui arrache le magasine des mains et prend position sur elle, la figeant à son tour dans son étreinte. Et maintenant mademoiselle l'étoile montante ?
- Maintenant ? Les jambes de mademoiselle viennent enlacer les hanches de son amant, qu'elle ramène sensuellement contre elle, un sourire sulfureux au coin des lèvres. Maintenant tu vas me faire l'amour, nous allons planter ces lilas qui attendent depuis des heures et partir se balader sur le champs de Mars, dîner dans un endroit romantique et... peut être refaire encore un peu l'amour.
- Ça me va. susurre t'il sur le même ton, plongeant dans sa nuque, ses mains déjà en recherche des courbes qu'il désire si ardemment.

" Les roses de l'Europe sont le festin de Satan. "
Noir Désir

Public, le 03 Octobre 2001 :
Le couple le plus sensuel de la capitale bat de l'aile. Ann Traur, mannequin dont la carrière et la popularité ne sont plus à prouver, et Manek Kirschnen, ce photographe avant-gardiste qui fait tourner toutes les têtes, rencontrent des difficultés devenues aussi célèbre que les stars elles mêmes. Samedi dernier, une dispute explosait en plein gala de charité entre les amants les plus élégants du monde de la mode. (...) Ci dessous, des photos de Ann entrant dans un hôtel, la nuit dernière. Est ce la fin du Romantisme version haute couture ?s

- J'ai trouvé un travail à New-York.
Assise à la table de leur luxueuse cuisine, Ann laisse choir sa cigarette dans le cendrier, le souffle coupé. Elle lève les yeux vers son compagnon, noyé depuis la fenêtre dans la contemplation des toits qu'ils dominent.
- New-York ?
- Puisqu'on a décidé de prendre quelques distances...
- Quelques distances Manek. Pas des milliers de kilomètres. Qu'est ce que tu vas foutre à ... New-York ?
- Un... scientifique a repéré quelques uns de mes clichés et... il me propose de travailler sur un nouveau documentaire avec lui. Tu sais bien que j'ai toujours rêvé de faire ça.

Sa voix est brisée. Aussi morte que le cœur qu'il est entrain de malmener.
Il se tourne vers elle. Le cœur au bord des lèvres, elle n'a pas le courage d'affronter les rides qui sont nées il y a peu sur le visage fatigué de son amant. Elle baisse le regard, déglutit avec peine, absorbée par cette cigarette qui se consume toute seule.
- Je reviendrai, je te le promets. Je ne sais pas combien de temps ça va prendre mais... Après ça, on pourra repartir de zéro. Si c'est toujours ce que tu souhaites.

Il sort. Ann ferme les yeux. Elle écrase une larme. Puis c'est un flot continu qui la submerge en silence, au milieu de cette inertie parfaite qu'on lui a enseignée. Elle renifle, s'essuie les joues, mais les gouttes amères continuent leur course. Si seulement elle pouvait trouver un responsable qui ne soit pas elle. Mais non... Elle ne le retient pas. Elle ne sait plus comment le retenir.

" Le printemps s'est enfui depuis longtemps déjà;
Craquent les feuilles mortes, brûlent les feux de bois.
À voir Paris si beau en cette fin d'automne,
Soudain je m'alanguis, je rêve, je frissonne.
Je tangue, je chavire, et comme la rengaine
Je vais, je viens, je vire, je me tourne, je me traîne.
Ton image me hante, je te parle tout bas
Et j'ai le mal d'amour, et j'ai le mal de toi . "
Barbara

Dis, quand reviendras tu ?
Ann jette un regard à sa montre. Il lui reste deux heures avant son rendez vous à l'agence. D'un pas lent, monocorde, elle se hisse en haut des marches de Montmartre pour contempler la vue, le manège, les bistrots. Voilà deux ans que Manek a quitté la France, un an qu'ils ont perdu tout contact. Et malgré cela, elle sent encore son cœur s'écraser dans sa poitrine chaque fois qu'elle refait ce chemin en arrière. Les larmes la gagnent toujours. Son être entier voudrait pouvoir s'allonger sur ces marches, fusionner avec elle, ne plus penser, ne plus devoir. Juste... s'évanouir dans ce merveilleux sol.
Mais déjà, son portable résonne. Ce doit être sa directrice, ou probablement son agent. Un changement d'horaires ? Déjà, une femme se précipite vers elle. Elle est sa plus grande fan, on peut les prendre en photos, s'il vous plaît ? La masse noie ses relents de nostalgie, le travail fait oublier les traits de son Amour.
Elle sombre.

Vogue, le 15 Avril 2004 :
La carrière d'Ann Traur est à l'apogée de sa gloire. Élégante, rafraîchissante, cette égérie de la mode ravit désormais le coeur de toutes les foules et bien loin dans le monde. L'été dernier, la collection Prada utilisait presque exclusivement l'image absolument pure signée " Traur ". D'ici quelques mois, un défilé est prévu pour le printemps, dont mademoiselle sera le visage principal. En couverture de tous les magasines, Ann a conquis l'âme de la France entière.
Mais elle n'est pas seulement un mannequin exceptionnel. C'est aussi une femme pleine de bon sens et d'humanisme dont nous vous peignons le portrait en page 4. Entre autres, les clichés pris aux Restos du Coeur, dont Ann a suivi le travail tout l'hiver, en posant pour leur fond et en mettant la main à la pâte. Désormais en vacances pour se remettre de ces longs mois, la belle s'est laissée séduire par les plages de Miami. L'attente de son retour est dans tous les esprits de la mode. (...)

- Manek ?

Assis derrière le comptoir de l'hôtel, un whisky en main, l'homme relève le regard vers l'auteur de cet appel. Il la voit. Il blêmit, lâche son verre.

- Annika !

Le coeur de la belle fait un embardée délicieuse, de celles qu'elle n'espérait même plus. Au bord de l'explosion, elle se contient tant bien que mal et bondit dans ses bras sans préavis. Elle retrouve son odeur puissante avec délice, bien qu'un nouveau parfum lui fasse froncer le nez. Blottie contre lui, elle retient des larmes d'émotion et le serre d'avantage, sans considération pour ce qu'il en pense. Après quelques secondes, elle le lâche, la main toujours ancrée sur son bras.

- Qu'est ce que tu fais ici ? balbutie t'il, incrédule, presque trop pâle.
- Je suis en vacances. Et toi ? Tu n'as pas l'air content de me voir !
- Oh et bien je...
- Ah enfin te voilà.

C'était donc ça. Une femme. Aussitôt, la main d'Annika retombe, son regard se fige de la même incrédulité. Elle la regarde, choquée, sans même plus se sentir capable de faire un geste.
- Alison ! Euh... il tousse. Ann, je te présente ma fiancée et Alison, voici Ann Traur.
- Je sais qui c'est enfin, pour qui me prends tu ? Enchantée. Je suis l'une de vos plus grandes fans.

Elle tend la main. Ann la regarde comme s'il s'était agi d'un spectre. Son regard divague, elle sent la nausée lui prendre les tripes. Parle, dis quelque chose. Ses yeux errent sur les clients BCBG, à la recherche d'une aide, d'une boisson ou d'un peu d'air, tout simplement. La parole, peut être ?
- Oui ... Pardonnez moi mais... J'ai mal à la tête tout à coup. Tout ce whisky, wouf!, ça monte vite. Ravie de vous avoir rencontrée ceci dit.

Elle rit nerveusement. Un rire jaune, qui sonne faux. Le whisky ne monte pas aussi vite que le dégoût.
D'un même geste, elle reprend son sac et fait demi tour, le plus loin possible. Il lui semble entendre Manek l'appeler, mais elle accélère encore. Elle va vomir.
La porte de sa suite est franchie violemment. Sans même se donner la peine de la refermer, elle laisse choir ses affaires et se précipite vers son bar privé. Elle a besoin d'un verre. Un vrai verre. Et d'une tonne d'anti-dépresseurs. Elle renverse la moitié du cognac en voulant le remplit, boit d'une traite l'une des boissons les plus chères du marché. Trop choquée pour pleurer, hurler ou même respirer, elle pose deux doigts incrédules sur ses paupières. Son cœur semble vouloir lui broyer les entrailles, sa douleur fait remonter un flot de bile jusque dans sa gorge. Elle tremble.

- Annika.

Elle sursaute. Manek est dans l'encadrement de la porte, déconfit. Aussitôt qu'elle le voit, le choc s'évapore, remplacée par une telle violence qu'elle doit se retenir de lui jeter sa bouteille à la figure. Elle le toise, révulsée, haineuse.

- Écoute, je peux tout expliquer...
- Ann.
- Quoi?
- C'est Ann maintenant. Je m'appelle Ann.

Sa voix est glaciale, placide. Elle la contrôle frénétiquement, certaine de pouvoir le tuer si elle laisse place au moindre débordement.
- Alison est...
- Une pute. Et toi tu es une ordure. Maintenant si c'est tout ce que tu voulais me dire, sors de cette chambre.
- Ne dis pas ça.
- Quoi ? Pute ? Tu préfères salope ? Non parce que moi j'ai quand même un gros faible pour pute.
- Annika...
- C'EST ANN BON DIEU DE MERDE !!

Elle fracasse la bouteille au sol. Une arme du crime en moins.
Écrasée par la douleur, elle se compresse nerveusement le visage; " Comment as tu pu ? " gémit elle, à peine audible. Son cœur est en miettes.
- COMMENT AS TU OSE !! Sais tu seulement le nombre d'heures que j'ai passées à t'attendre ?! Tu n'as même pas eu la politesse élémentaire de m'envoyer une note quand tu te retirais du marché !! Tu as osé me dire que tu reviendrais et je te retrouve en Floride dans les bras d'une putain d'américaine !!!
- Ce n'était pas prévu...
- Dehors... se fige t'elle à nouveau, glaciale.
- S'il te plaît.
- Dehors dehors DEHORS ! Tu sors d'ici, tu sors de ma vie et de mon cœur ! JE NE VEUX PLUS JAMAIS ENTENDRE PARLER DE TOI !!

Il baisse le visage. Et il s'en va. Ruinée, elle s'effondre à genoux, au milieu du cognac. Un hurlement déchirant lui transperce la gorge.

" Now he's gone, I don't know why.
Till this day sometimes I cry.
He didn't even say goodbye,
He didn't take the time to lie.
Bang bang... My baby shot me down. "
Nancy Sinatra.

- Ma chérie ?

La suite est plongée dans le noir. Assise dans le même fauteuil depuis des heures, Ann laisse paisiblement son corps mourir. Quand son agent allume les lumières, elle grimace, détourne plutôt le regard vers son verre de cognac, qu'elle vide, à la même manière que les six derniers : sans respect ni considération. Elle renifle pour refouler les larmes qui ont tendances à couler toutes seules et s'enfonce plus avant dans les coussins. Son agent, une quadragénaire implacable, embauchée par sa directrice pour lui faire toucher le sommet, s'arrache un sourire faussement tendre. Elle aussi, elle lui donne envie de gerber. Elle et tous les autres. Ann lâche un soupir méprisant, elle se penche pour chercher mollement sa bouteille. Mais la fourbe est plus rapide et s'en empare avant.

- Non ça suffit avec l'alcool. Tu vas grossir, avoir des rides et les vaisseaux sanguins éclatés. Très mauvais.
- Rends moi ça avant que je ne traine en justice pour violation de vie privée.

Son agent se gausse. Ann lui jette un regard d'autoroute. Elle récupère sa bouteille.

- Je comprends que tu sois malheureuse. Mais tu ne peux pas te laisser aller comme ça.
- Et pourquoi donc ? réplique la belle, à moitié saoule. L'amour de ma vie est entrain d'en baiser une autre à l'heure qu'il est. Ma carrière ne peut que retomber. J'ai pas d'ami, personne en qui je puisse faire confiance parce que j'ai été suffisamment conne pour... pour placer toutes mes réserves de confiance en un seul mec. Et j'ai assez de fric pour être alcoolique jusqu'à la fin de mes jours. Alors tu sais quoi ? Merde.

Elle se remplit un huitième verre. Madame le lui arrache des mains. Cette fois ci, ça va vraiment barder.
Mais avant qu'elle n'ait pu dire quoique ce soit, Ann voit le visage de son agent se rapprocher dangereusement d'elle. Elle sent ses mains étreindre son doux visage. La nausée la reprend.

- Écoute moi bien ma petite. Tu n'as pas d'ami parce que ce n'est pas ton travail. Personne ne te demande d'avoir des sentiments ici. Je suis désolée que tu ais été " suffisamment conne " pour essayer quand même. Mais si tu continues à couler, tu vas perdre la seule chose qui te reste.
- Et qu'est ce doooonc ?
- La gloire. C'est tout ce que tu peux encore espérer.

Et le dragon esquisse un sourire monstrueux. Choquée, Ann sent toute sa conviction s'effondrer. Les larmes lui brouillent de nouveau la vue. " Et puis, tu as des contrats à honorer. "
Elle lui gerbe sur les chaussures.

Glamour, le 23 Janvier 2010 :
" Cette nouvelle année voit naître un nombre étourdissant de nouvelles étoiles dans le monde de la mode. L'agence " Caranston Models " connaît une renommée encore rarement égalée depuis la découverte des inoubliables, tels que Ann Traur. En parlant du loup, la belle allemande honorera cette année de nouveaux contrats, pour des lignes toujours plus sombres et élégantes. Mais la question commence à naître sur toutes les bouches : y a t'il un âge limite pour le mannequinant ? Mademoiselle Traur, qui fêtera cette année ses trente ans, ne devrait elle pas se résoudre à prendre sa retraite ? Elle qu'on qu'on a autrefois connu si professionnelle et raisonnable, elle fait au moins preuve d'une persévérance méritoire. "

Incapable d'en lire plus, Ann repose le magasine sur le bureau de sa directrice, à laquelle elle jette un regard fatigué. Comme elle ne trouve aucune réponse, elle laisse échapper un soupir las et détourne le visage. Elle prend le temps de peser ses mots avant de murmurer d'une voix gracieuse.

- Pour une fois, il faudrait peut être écouter ce que dit la presse.
- Ne dis pas de bêtises. Ce n'est qu'un magasine bidon. Et puis, j'ai pris la liberté de t'avoir quelques contrats. Ce n'est pas cette année que tu pourras devenir " raisonnable ".
- Cet acharnement commence à me peser madame. Et je doute que je vous sois encore très utile.
- Tu doutes ?

Le ton monte. Ann baisse le visage. La dernière femme à pouvoir encore l'intimider...

- Je ne te paye pas pour douter. Les marques te réclament encore et c'est tout ce que je veux savoir. Tu as rendez vous avec des photographes pour Dior demain à huit heures. Tapantes.
- Très bien, très bien. capitule t'elle, épuisée. Et mon projet de shoots pour une récolte de fonds pour Haïti ?
- Ah oui, tu as mon accord. Mais tu te débrouilles, je ne veux pas en entendre parler.
-Très bien, merci madame.

La directrice esquisse un geste évasif, qu'Ann connaît par cœur. Ça veut dire fous le camp. Elle se lève et quitte le bureau, un goût amer plein la gorge.

Diiiiane ! (Annaaaaa !!!)

Bienvenue à toi sur le forum, je te réserve Diane pour une semaine.
Si tu as des questions ou autre, on est là.

Bienvenue!

DIAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAANNE ! P'tain, mais comment j't'adore toi ! Personne ne l'a prend jamais dans les fo' où je vais, ce qui est dommage car pour moi, c'est THE sexy milf quoi !
Ann, nous aurons un lien (a)

Bienvenue et bon courage pour ta présentation Smile

Bienvenuuuuuuue Very Happy

Diane, très bon choix d'avatar, cette femme est splendide !

Bon courage pour ta fiche Smile

*blêmit légèrement, esquisse un sourire tétanisé*
Wahou... eh ben merci. *rires* Je vais tâcher d'honorer cette superbe femme comme il se doit.
Ma fiche me prendra un peu de temps, je pense. J'ai beaucoup à dire pour justifier mes choix.
Merci encore à vous tous et à la confiance du staff. Cet accueil me fait très plaisir.

~~chez les fous xD~~

Ann Traur a écrit:: *blêmit légèrement, esquisse un sourire tétanisé*
Wahou... eh ben merci. *rires* Je vais tâcher d'honorer cette superbe femme comme il se doit.
Ma fiche me prendra un peu de temps, je pense. J'ai beaucoup à dire pour justifier mes choix.
Merci encore à vous tous et à la confiance du staff. Cet accueil me fait très plaisir.

N'aie pas peur, on va pas te bouffer XDDDD
Prends ton temps, tu as deux semaines, si tu as besoin de plus de temps, on pourra t'accorder un délai x)

DKRUGER c'est vraiment la classe suprême, la femme par excellence Very Happy

Bienvenue parmi nous, aliens quelques peu dérangés, on ne te fera pas de mal (;

Ha, c'est ce qu'ils disent tous !
Bref, merci. xD Je vais arrêter de flooder aussi frénétiquement et m'atteler à ma fiche, hein.

Bienvenue

Kruger

& t'inquiètes, ils sont un peu tarés mais gentils au fond (a)

Pourquoi "ils" ? x) Parce que toi t'es pas tarée, Pixie ? x)

Buzz, va donc finir ta fiche au lieu de flooder aussi frénétiquement :p x)

Et Ann, si tu floodes c'pas grave, on te fouettera pas ! (quoique... XD)

Ouais, parce que eux, au moins, ils n'ont pas de moustache sur la figure. Very Happy

( règle n°1 : toujours approuver ce que dit l'admin. )
( oui mais flooder, c'est mal. Et je ne veux pas être fouettée, je dois prendre soin de mon corps paraît il... )
( je suis la professionnelle absolue des parenthèses inutiles)

Lucjan W. Janowczyk a écrit:: Pourquoi "ils" ? x) Parce que toi t'es pas tarée, Pixie ? x)

Je suis parfaitement saine & nette, contrairement à vous What a Face

Bienvenue ^^

Pixie M. Armstrong a écrit:

Lucjan W. Janowczyk a écrit:: Pourquoi "ils" ? x) Parce que toi t'es pas tarée, Pixie ? x)

Je suis parfaitement saine & nette, contrairement à vous What a Face

Le fou se croit sage et le sage reconnaît lui-même n'être qu'un fou. (Shakespeare).

Cogitte là dessus Pixie, on en reparle après Very Happy

Anouck E. Bojaruniec a écrit:

Pixie M. Armstrong a écrit:

Lucjan W. Janowczyk a écrit:: Pourquoi "ils" ? x) Parce que toi t'es pas tarée, Pixie ? x)

Je suis parfaitement saine & nette, contrairement à vous What a Face

Le fou se croit sage et le sage reconnaît lui-même n'être qu'un fou. (Shakespeare).

Cogitte là dessus Pixie, on en reparle après Very Happy

ET BAM ! XD
Bien dit poulette Wink

Ahaha, d'accord je vais y réfléchir (:
& arrêtez de vous liguer contre moi, bande de vilains !

Bienvenue

Diane, Diane, Diane I love you

Lucjan W. Janowczyk a écrit:: Pourquoi "ils" ? x) Parce que toi t'es pas tarée, Pixie ? x)

Buzz, va donc finir ta fiche au lieu de flooder aussi frénétiquement :p x)

Et Ann, si tu floodes c'pas grave, on te fouettera pas ! (quoique... XD)

Maaais euuuh -____-'

*rires* je commence à comprendre pourquoi j'ai droit de flooder ici xD
Elle, Alexander, je vous remercie bien bas.
Voilà, il ne me reste plus que l'histoire. Si j'ai l'accord pour poursuivre dans cette voie sans modification, elle devrait être achevée en début de semaine prochaine.

Tu veux que je lise le reste avant et te dises si tout est correct et en corrélation (comment j'adore ce mot [sauf en contrôle de transaction, vu que je sais pas le faire Rolling Eyes

], et tu vois Rox, on peut le mettre où on veut héhé), et tu feras l'histoire après ?

Normalement on lit tout d'une traite une fois finito, mais si tu préfères voir si tu cernes le groupe, etc... I can.

Hey, moi aussi j'me suis mis à ma fiche au lieu de flooder, hein. Je montre l'exemple, Buzz, tu peux suivre Razz

Eh ben écoute oui, si ça ne te dérange pas. Ceci dit je comprendrais aussi que ça te saoule complètement et qu'en plus, tu ne veuilles pas faire ça pour ma fiche plutôt que d'autres.

Mais le truc c'est que ma bio est basée entièrement sur ce que je viens déjà d'écrire alors... comme elle va me prendre des heures de préfèrerais être sûre quoi xD.

J'avais proposé à Blueberry de le faire aussi (par mp), donc pas de souci.
Puis vu que tu joues un perso un peu différent, je comprend.

Je m'y met sur le champs, je te tiens au courant ici-même dès que j'ai lu ça.

**Contenu sponsorisé**